Quelle était votre place dans la famille en tant que fille ?
- Mes sœurs et moi, nous avons travaillé autant dedans que dehors, pour aider à la ferme. Il n’y avait pas de garçon.
- Je faisais tout le travail qu’il y avait à faire, dans la maison et dehors. Quand le travail est là, il faut le faire !
- Nous étions quatre filles. Chacune avait sa fonction : l’aînée débusquait les interdits, la seconde était la plus sage, la troisième (moi) c’était le garçon manqué, et la quatrième l’emmerdeuse !
Quels conseils vous donnait votre mère ? Y avait-il des sujets tabous ?
-Ma mère me donnait très peu de conseils pour la maison. Elle disait : « Tu verras bien quand tu seras chez toi ! »
-Ma mère ne nous disait rien au niveau de la sexualité. Mais nous avions un calendrier des postes où chacune, mes trois sœurs, moi et ma mère, faisait une croix pour marquer le premier jour de ses règles. C’était rassurant et permettait de savoir qu’on « avait fait attention ! »
-Son conseil rabâché quand j’étais ado, c’était : « Tiens-toi droite ! », mais moi je ne voulais pas qu’on voie mes seins.
Qu’est-ce qui aurait été différent si vous aviez été un garçon ?
- Si j’avais été un garçon, j’aurais repris la ferme familiale et je l’aurais gardée. Mais reprendre une ferme, pour une femme seule, ça ne se faisait pas à l’époque. J’aurais aussi aimé avoir un métier à moi.
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Pour moi, ça a été plutôt un atout d’être une femme, dans mon métier de directrice de MJC. Je n’ai jamais eu à prouver quoi que ce soit par rapport aux autres. Les femmes sont plutôt dans le « faire faire » que dans le « prendre la place de ».
Vous êtes-vous sentie libre de vos choix ?
- J’ai travaillé un peu en ville pendant plusieurs hivers, mais je n’aurais pas voulu y vivre.
J’ai eu quatre enfants, ils sont venus quand ils sont venus et ça s’est arrêté comme ça.
-Je me considère comme une personne libre et autonome, c’est ce que j’ai toujours voulu.
Je suis fière de n’avoir jamais été au chômage. J’ai fait le choix, en accord avec mon mari, de ne pas avoir d’enfants. Parfois, quand on voyage dans des pays très traditionalistes, on s’invente une famille, pour ne pas choquer.
L’image de la femme a-t-elle changé, à votre avis ?
- L’image de la femme n’a pas vraiment changé : elle est simplement passée de femme-potiche à femme-objet, en partie à cause du rôle néfaste de la pornographie accessible trop tôt et trop facilement.
Et la place de la femme dans la famille et dans la société ?
-J’ai été une des premières à prendre la pilule. Aujourd’hui, je suis choquée par le glissement de position de certaines femmes qui renoncent à cette liberté chèrement acquise au nom de « laisser faire la nature ».
- Les femmes ont gagné en visibilité sur le plan professionnel, mais au niveau familial le partage des tâches n’est pas toujours équitable, ce qui entraîne des tensions.
Y a-t-il un caractère féminin ? Qu’est-ce qu’une femme ?
-On doit être par nature moins hargneuses que les hommes, parce qu’on donne la vie. La femme a un rôle de protection et de préservation de la vie, on le voit bien dans les périodes de guerre ou de famine.
- Une femme est un être vivant sexué de façon visible. Il y a une réelle différence entre hommes et femmes par rapport au regard qu’ils portent sur le monde. Mais beaucoup d’hommes ressentent aussi très fortement leur part féminine.
Vous diriez-vous féministe ?
– Féministe, oui parce que ce sont toujours les mecs aux commandes. Pourtant tout est en place pour que ça change !