Au cours de ces dix dernières années, notre expérience “Odette” nous a amenées à rencontrer beaucoup de femmes, avec des parcours et des points de vue très différents.
Notre objectif a toujours été de mettre en valeur leurs initiatives et leur ténacité.
Ce travail et ces rencontres amènent bien évidemment à se questionner sur la place des femmes dans la société, dans la famille, sur l’évolution des droits et de l’image de la femme, sur la forme que le féminisme peut prendre aujourd’hui. Egalité, parité, équité, complémentarité ?
C’est pourquoi, nous avons eu envie d’interroger des femmes de diverses générations et de diverses origines sur ces questions.
Notre panel de femmes va de 11 à 101 ans !
Nous avons travaillé à établir deux questionnaires différents : un pour les jeunes adolescentes, un autre pour les femmes à partir de 20 ans.
Toutes les femmes rencontrées ont été enthousiastes pour répondre à nos questions et nous les en remercions vivement.
Nous ne prétendons pas, par cette enquête, apporter de réponses sociologiques, mais des éléments de réflexion. Nous avons nous-mêmes été parfois surprises de voir surgir des thèmes auxquels nous n’avions pas pensé. C’était passionnant !
Voici un premier groupe de réponses de la part des femmes de la vingtaine à la quarantaine.
Au cours des prochaines semaines, découvrez les réponses des autres groupes d’âge !
Quelle était votre place dans la famille en tant que fille ?
- Je n’ai pas été sollicitée plus que mon frère pour aider à la maison, mais nous l’avons fait tous les deux parce que ça nous semblait normal de participer à la vie de la communauté.
- Ma mère n’a pas voulu me faire porter la responsabilité de mes cinq petits frères, mais ma sœur et moi, nous avons aidé sans qu’on nous le demande.
Quels conseils vous donnait votre mère ? Y avait-il des sujets tabous ?
-Ma mère m’a toujours dit : « Fais ce que tu as envie de faire, mais dans le respect des autres ».
- Ma mère ne m’a pas donné de conseils orientés « femme ». On ne parlait pas trop de sexualité, mais ma mère nous laissait à disposition des revues pour ado qui expliquaient cela. Mes parents trouvaient que les rapports sexuels étaient trop vulgarisés ; pour eux, cela ne devait jamais être anodin. Moi, j’ai eu envie de « désacraliser » ça.
Qu’est-ce qui aurait été différent si vous aviez été un garçon ?
-J’aurais assumé plus sereinement et plus complètement ma vie sexuelle ; car les hommes qui ont plusieurs conquêtes sont toujours considérés comme des séducteurs, mais les filles comme des salopes. Mais être un garçon n’aurait pas changé ma personnalité.
- Cela n’aurait pas changé mes choix d’orientation professionnelle puisque je fais un métier réputé masculin. J’ai quand même senti une discrimination envers les filles lors des recherches de stages en apprentissage. C’est pas normal de devoir se battre quatre fois plus pour une femme pour faire sa place !
-Je pense que j’aurais eu plus de liberté, en particulier au niveau des relations amoureuses.
Vous êtes-vous sentie libre de vos choix ?
-Je me suis sentie libre et légitime dans mon choix d’orientation en section scientifique, je n’ai pas senti de discrimination. En tant que naturaliste, je suis bien acceptée, même si c’est plutôt un milieu masculin. Il n’y a que lorsqu’on doit travailler avec des fédérations de chasse que je sens une nette résistance à l‘égard des filles.
-Je me sens libre maintenant, mais j’ai mis du temps à me défaire des schémas traditionnels : avoir un métier « de femme », le mariage, les enfants…Souvent, on ne s’aperçoit pas que, nous-mêmes, on nourrit les diktats et, en même temps, on voudrait en être libérée.
L’image de la femme a-t-elle changé, à votre avis ?
-Dans la publicité, les critères de féminité ne changent pas. Par exemple, il y a très peu de pub avec des femmes en surpoids. Quand il y en a une qui paraît, on dit Bravo ! mais ça reste exceptionnel.
-L’image de la femme change, mais dans la lenteur et avec un côté sournois. Les hommes pensent que c’est bon, l’égalité est là. Pourtant on entend encore beaucoup de remarques sexistes. Maintenant, les femmes réagissent davantage à ce genre de propos.
-L’image de la femme a changé grâce aux luttes des femmes qui ont réussi à se rassembler pour faire valoir leurs droits.
Et la place de la femme dans la famille et dans la société ?
-Il n’y a pas de prédisposition pour une femme à être bonne cuisinière ou bonne ménagère. C’est seulement le résultat de l’éducation. Ces tâches-là peuvent vraiment être partagées. En tous cas, la charge mentale repose surtout sur la femme.
- C’est difficile pour une femme de faire sa place dans la société ; elle doit parfois adopter des comportements masculins pour s’imposer. Dans des postes haut-placés, les femmes sont souvent pires que les hommes.
-Le prétexte du physique plus fort chez l’homme, c’est bidon ! Il y a des moyens techniques dans tous les métiers pour faire les mêmes choses sans se faire mal. Je ne dis pas qu’on doive être égaux en tout, il faut juste qu’on ait le choix. Le partage des tâches selon le genre ou selon la force physique n’a plus de raison d’être.
-La femme n’est toujours pas considérée comme l’égale de l’homme, ce qui conduit à des formes de violence (femmes violentées, battues, maltraitées)
Y a-t-il un caractère féminin ? Qu’est-ce qu’une femme ?
-Je ne saurais pas dire s’il y a un caractère féminin. Il me semble qu’en général, les femmes font plus attention aux autres. Elles auraient beaucoup à apporter si on leur donnait davantage confiance en elles. Cela vient de l’éducation en grande partie.
-Il n’y a pas de caractère féminin, c’est le yin et le yang, deux énergies dont chaque être humain est pétri.
- Une femme n’est pas forcément douce, attentionnée, patiente et généreuse. C’est une question de tempérament plus que de genre.
-Une femme ? C’est le sexe féminin de l’espèce humaine. Il y a seulement des tendances féminines, mais je ne sais pas si c’est inné ou acquis par l’éducation ou le modèle.
-Une femme porte les enfants. C’est bien dommage que ça ne puisse pas être aussi les hommes !
-Les femmes ont un côté très hormonal qui agit sur leur humeur qui peut être changeante, dépressive. C’est dû au flot d’hormones que les hommes ne connaissent pas. Il faut comprendre et arriver à vivre avec ça.
Vous diriez-vous féministe ?
-Oui car je suis favorable à l’idée de ramener la femme à égalité avec l’homme, mais je ne me sens pas militante féministe. Des hommes aussi sont victimes de harcèlements, de discriminations, de violences. Je ne souhaite pas que le féminisme devienne un mouvement des femmes contre les hommes, ni que les femmes deviennent dominantes. Le mouvement féministe doit rassembler et non diviser.
-Oui, féministe à fond, mais sans violence. Je souhaite pointer du doigt toutes les remarques sexistes, les injustices. Le pouvoir est toujours détenu par les hommes et, à mon avis, ils n’ont pas envie de le lâcher. Il faudrait se demander de quoi ils ont peur ?
- Non, je ne me dirais pas féministe, car cela a été trop dur à un moment contre les hommes et ça a provoqué un blocage chez certains hommes, qui se crispent dès qu’on parle de féminisme. J’aimerais qu’on se dise tous humanistes !
Et vous, qu’auriez-vous répondu ?